mardi 10 mars 2009

Milva, la rousse








Les apparitions au cinéma de la superbe rousse Milva, une des plus prestigieuses artistes de la chanson italienne ne sont pas nombreuses. Sans doute parce qu'elle a préféré chosir ses rôles avec la même exigence de qualité et de diversité que ses chansons.


Née en 1939, Milva débute dans la chanson grâce à un concours télévisé. La puissance et la beauté de sa voix vont en faire une célébrité du jour au lendemain. Son deuxième 45 tours, avec la version italienne de Milord d’Edith Piaf cartonne d’emblée, et ce n’est que justice tant sa reprise est convaincante. Celle que l’on surnomme déjà la panthère de Goro (par opposition à Mina, la tigresse de Cremona) fait une courte apparition chantée dans un musical allemand « Oh Mamma mia » avec le baryton Fred Bertelmann, et dans une production italienne réunissant les vedettes de la chanson à la mode.

Malgré sa grande beauté (une rousse flamboyante, le corps gainé dans un fourreau qui évoque furieusement Rita Hayworth), Milva ne détient pas l’ironie et le coté frivole de sa rivale Mina et n’a donc n’a pas du tout la personnalité requise pour figurer en vedette dans les petites comédies musicales un peu farfelues qu’on tournait alors à la pelle dans la botte italienne. Cependant, il semble qu’elle soit davantage intéressée par de vrais rôles de comédienne, qu’on ne lui confiera hélas qu’avec parcimonie. Ainsi en1962, elle incarne une danseuse vulgaire, rivale de Gina Lollobrigida dans la « Beauté d’Hyppolite » de Zagni. Dans les années qui suivent, Milva va connaître de beaux succès dans le domaine de la variété, en participant de nombreuses fois au fameux festival de San Remo, sans jamais gagner le fameux concours (pourtant en 1969, son interprétation de Canzone est si splendide qu’elle aurait bien mérité un prix) et à un show TV allemand avec Fernandel. Mais la chanteuse va surtout explorer d’autres pistes, moins populaires, mais souvent plus glorieuses : un disque de chants révolutionnaires du monde en entier (comprenant sa mémorable interprétation de bella ciao), un spectacle autour des lieder de Brecht et Kurt Weill (son autorité et la hargne de son interprétation conviennent tout à fait à ce répertoire de grande classe),un hommage aux années 30 (avec reprise des tubes de grandes divas du ciné d’avant guerre comme Marlène, Zarah Leander, Pola Negri).



En 1972, on la retrouve au cinéma dans un drame dont elle chante aussi le générique d’Ennio Morricone. D’amore si muore raconte l’histoire d’un cinéphile adulant les vedettes de cinéma (un adepte de DVDclassik ?) fou amoureux de Silvana Mangano, qui finit par ce donner la mort. La prestation de Milva (dans un rôle très déshabillé) sera distinguée, même si le reste du film sera beaucoup raillé.Dans les années 80, on va beaucoup voir Milva chez nous (elle va d’ailleurs enregistrer plusieurs disques pas terribles en français), notamment dans un spectacle aux cotés du génial Astor Piazzola. A cette occasion, elle tourne 2 films en France : une comédie policière « Mon beau frère a tué ma sœur » avec Juliette Binoche et Michel Piccoli, et « Prisonnières », un drame assez raté situé dans une maison d’arrêt (avec Annie Girardot) et « au-delà du vertige » un film de guerre polonais de Zanussi.
La grande dame de la chanson continue sa carrière, principalement en Allemagne (où elle a été une très grande vendeuse de disques dans les années 80), au Japon (plus de 25 tournées là-bas), et dans son pays, où elle reste encore renommée même si elle n’a pas remporté de succès depuis des années. Elle a vécu plusieurs années avec Luigi Pistilli, un grand comédien de théâtre, spécialiste de Brecht et acteur de cinéma à l’occasion (pour une poignée de dollars), qui s’est suicidé peu après leur séparation. J’ai eu la chance de la voir lors de son passage à Paris, il y a 8 ans, avec Daniel Binelli, un disciple de Piazzola, au bandonéon, pour un spectacle de grande classe, dans une salle comble (alors que le show avait bénéficié de très peu de publicité). Elle a participé cette année pour la enième fois au festival de San Remo, encore une fois sans remporter la récompense. Peut être l’année prochaine ?

1 commentaire:

  1. Article très intéressant, bien documenté sur une chanteuse majestueuse, qui a su conserver toute sa simplicité, en dépit de son aura authentique et méritée.

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