dimanche 1 mars 2009

Liza Minnelli, avec un Z





Liza Minnelli est sans aucun doute une légende vivante du music hall et du cinéma. Pourtant en dépit de sa présence incroyable, la fille de Judy Garland a joué dans beaucoup moins de films que sa mère. Devenue célèbre alors que le temps des grandes comédies musicales et des grands studios était déjà révolu, celle-ci a eu moins d’opportunités de faire valoir son immense talent à l’écran. Si l’on peut dire que toutes les fées se sont penchées sur le berceau de la petite princesse d’Hollywood, force est de constater que sa vie a rapidement viré au cauchemar : grandeur et décadence de Liza Minnelli.




Dès sa naissance en 1946, Liza Minnelli fit la une des journaux. Fille de Judy Garland, la plus populaire vedette de comédies musicales et de Vicente Minnelli, un des réalisateurs les plus brillants des années 40-50, Liza grandit dans l’univers doré d’Hollywood et fait sa première apparition à l’écran en 1949 dans in the good old summertime aux cotés de sa maman. Une usine à rêve qui cache aussi bien des mesquineries et des drames. Minée par de graves problèmes de dépression, Judy Garland fait une tentative de suicide en 1951 et divorce la même année.Liza vivra la moitié de l’année chez son père et l’autre chez sa mère. Toute jeune, elle participe à un show télé avec Gene Kelly en reprenant un passage de « for me and my gal » puis joue dans quelques comédies musicales à Broadway et enregistre un premier 33 T dès 1964. Sa voix est certes puissante mais encore mal maîtrisée et ne possède pas encore la chaleur de celle de sa mère.



En 1965, Judy Garland, dont la côte a fortement décliné et dont la tournée en Australie s’est révélée catastrophique, cherche une idée pour regagner la faveur du public. Sans prévenir sa fille, elle annonce publiquement que cette dernière chantera à ses cotés lors de deux soirées au palladium de Londres. Liza, qui aurait sans doute préféré voler de ses propres ailes est bien obligée d’accepter le challenge. Galvanisée sans doute par la confrontation, Judy donnera une meilleure prestation que sa fille pas encore assez expérimentée face à un tel monstre sacré.



L’année suivante, elle joue dans son premier film (en dépit de la réticence du studio Universal qui ne la trouve pas jolie), Charlie Bubbles, une production britannique d’Albert Finney. Le comédien conseillera à la jeune vedette de jouer son rôle avec beaucoup de retenue « elle a un visage si expressif, qu’il ne faut surtout pas qu’elle en fasse trop ». Sage recommandation. En effet, comme le dira Bruno Coquatrix, le patron de l’Olympia, Liza est une « excessive » dont il n’est pas toujours facile de canaliser le talent et la forte personnalité. Après deux autres comédies (the sterile cukoo de Pakula et Junie Moon d’Otto Preminger), Liza explose en 1972 dans le magnifique Cabaret, magistrale adaptation d’un spectacle de Broadway. Ce film, situé dans le Berlin des années 30, est certainement une des plus grandes réussites de l’histoire de la comédie musicale (quelle honte qu’il n’existe pas encore de vrai DVD collector digne de ce nom !). Quant à Liza, elle est extraordinaire dans le rôle de Sally Bowles, artiste immature et complètement paumée. Une composition sans doute pas très éloignée de la personnalité de l’artiste qui lui vaudra un oscar amplement mérité et sur laquelle repose en grande partie sa légende.



Dans la foulée, Liza enchaînera sur une tournée « Liza with a Z »en reprenant entre autres les chansons du film : ce spectacle de grande qualité est ressorti en DVD dans une version soit disant remasterisée mais dont l’image est si floue qu’on est obligé de se frotter les yeux en la visionnant !Si Liza savoure son succès et une gloire égale à celle de sa mère (ses shows à Broadway lui valent également des récompenses prestigieuses), sa vie privée est hélas aussi chaotique que celle de Judy. Après un mariage raté avec un ami de sa mère, le chanteur Peter Allen (le compositeur de Je vais à Rio de Claude François), un homosexuel notoire (qui décèdera du sida dans les années 90), elle cumule les liaisons avec de nombreux artistes de l’époque dont Peter Sellers, Charles Aznavour, Bob Fosse, Baryshnikov, Ben Vereen, Desi Arnaz Jr. Très instable, elle semble incapable de trouver son équilibre. Comme Judy aussi, elle s’enfonce très rapidement dans l’enfer de l’alcool et de la drogue.



Elle a également quelques difficultés pour retrouver un rôle digne de cabaret. Son jeu excessif dans Lucky lady (1975) est vivement critiqué, et Nina (1976), le film conçu avec amour par son père est hué lors de sa première. Les superbes décors ne parviennent pas à rattraper l’indigence du scénario et le laisser aller du cinéaste, même si l’on ressent de manière palpable tout l’amour et l’admiration qu’il pouvait ressentir pour sa fille.L’autre triomphe de Liza, c’est évidemment New York New York (1977), l’excellent film de Scorsese, non pas inspirée de la vie de Judy Garland, mais de Doris Day. Cependant, inévitablement, en voyant Liza arborer le look des années 40, on ne peut s’empêcher de penser à la grande Judy. Les magnifiques interprétations de Robert de Niro, en musicien de jazz psychotique et de Liza sont probablement les meilleurs ingrédients du film, avec les chansons dont l’inusable « New York New York » qui deviendra la chanson phare de Liza. Cela dit, à sa sortie, le film ne fera pas un tabac et sera curieusement moins bien accueilli que L’insignifiante comédie Arthur (1981) dans laquelle elle joue la petite amie de Dudley Moore. Liza y semble complètement perdue : peu après le film, elle entame une cure de désintoxication. Hélas, ce n’est le début que d’une longue série, car la grande chanteuse, incapable de se défaire de ses vieux démons va souvent replonger.


Comme sa copine Elizabeth Taylor, on l’aperçoit tantôt radieuse et ragaillardie (comme lors de ses magnifiques prestations au Carnegie Hall en 1986 (ah ! son splendide « but the world goes round » !, ou sa tournée mondiale avec Sinatra et Sammy Davis Jr), tantôt complètement bouffie et déprimée.Après un succès discographique au début des années 90 avec un album dance des Pet Shop Boys (qui venaient déjà de ressusciter Dusty Springfield) et un « losing my mind » classé au top 50 (notons au passage qu’elle a elle-même réalisé le clip vidéo), Liza tourne à nouveau une comédie musicale. Stepping Out n’aura aucun succès et les critiques ne manqueront pas de souligner la pauvreté des numéros musicaux par rapport à ceux de la grande époque. Pourtant, j’ai trouvé à l’époque ce film charmant : une petite comédie attachante, qui brosse avec justesse quelques portraits de femmes. La chanson composée par les fidèles Ebb et Kander est en outre tout à fait digne de leurs plus grandes réussites (Cabaret, New York…). Elle est également bien émouvante dans un téléfilm « Cœurs en sursis » en maman d’un jeune garçon atteint de mucoviscidose.


Après un passage réussi avec son vieux copain Aznavour à Paris (j’ai eu la chance de voir ce spectacle et en conserve un excellent souvenir), et une série de shows éblouissants à Las Vegas, la carrière de Liza sera désormais davantage jalonnée de bas que de hauts : toujours des problèmes de drogues et d’alcools, des scandales (quand notamment son garde du corps l’accuse de l’avoir violé ( !)) et aussi des gros problèmes de santé (opérations de la hanche). Son mariage clinquant avec son producteur en 2002, sous l’œil bienveillant de Michael Jackson et de Liz Taylor a vraiment des allures de grotesque musée de cire. L’union ne durera guère et se soldera par un divorce des plus trash qui fera la joie de la presse pour caniveau (le mari de Liza accusera cette dernière de l’avoir trompée, battue et de choses encore plus infames).Comme Francis Lalanne en France, elle envisagera même d’être filmée 24 H sur 24 H dans une émission de télé réalité…avant de se rétracter dans une soudaine lueur de lucidité.


Liza Minnelli (que l’on a pu voir chanter en 2005 dans la star academy) envisage d’enregistrer un album consacré à Kay Thompson en 2007 et de donner une tournée en Scandinavie. Elle reste une légende, et même si ces interprétations n’ont plus la puissance et la splendeur de ses shows des années 80, elles sont toujours blindées d’émotion. Une artiste majeure, extrêmement attachante qu’on aimerait bien revoir à Paris.

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